Concurrence dans les filières REP : la grille d'analyse de l'Autorité de la concurrence | Fieldfisher
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Concurrence dans les filières REP : la grille d'analyse de l'Autorité de la concurrence

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Consultée par le ministère de l'économie sur la filière de "responsabilité élargie du producteur" ou "REP" des huiles usagées, l’Autorité de la concurrence (ci-après l’« Autorité ») a rendu un intéressant avis n° 21-A-13 du 11 octobre 2021.
 
Plus précisément, la filière huiles étant envisagée par le Gouvernement comme un système "mixte" entre un mécanisme de passation de marché (présenté comme celui des éco-organismes opérationnels) et un mécanisme de soutien financier en "guichet ouvert" (présenté comme celui des éco-organismes financiers), l'Autorité était saisie des critères d'allotissement des quantités d'huiles collectées dans le mécanisme de marché (et non dans le mécanisme de "guichet ouvert"). L'Autorité rend un avis défavorable sur l'adoption de tels critères (auxquels a d'ailleurs renoncé le gouvernement suite à cet avis) et, au-delà, invite le Gouvernement à s'interroger sur l'efficacité du système "mixte" envisagé.
 
A noter que l'Autorité était ici saisie par le ministère (sur le fondement de l’article L. 462-1 du Code de commerce qui dispose que l’Autorité « donne son avis sur toute question de concurrence à la demande du Gouvernement ») mais que cette faculté est également ouverte notamment aux « organisations professionnelles et syndicales », qui disposent ainsi d’un moyen efficace de bénéficier de la grille d'analyse de l'Autorité en matière de filières REP.
 
Plusieurs éléments de l'analyse de l'Autorité de la concurrence retiennent l'attention :
   
  • L'Avis contient, après audition des parties prenantes, une analyse fine du marché concerné et de l'impact du projet envisagé sur ce marché. En matière de filières de REP, l'Autorité a ainsi toujours tenu compte des spécificités de chaque filière, chacune devant être considérée comme un marché distinct, et l'on peut regretter que sa saisine ne soit pas systématique pour la mise en place des 22 filières réformées ou créées par la loi AGEC (laquelle a au contraire pour objectif d'uniformiser au maximum le mécanisme de la REP).
 
  • L'analyse de l’Autorité repose sur l'examen de la règlementation envisagée et plus particulièrement sur la vérification que cette réglementation soit « d’une part, justifiée par un objectif d’intérêt général, et, d’autre part, nécessaire et proportionnée à la réalisation de cet objectif » (§63), notamment au regard des principes de libre concurrence et d'élimination des barrières à l'entrée.
 
  • Ensuite, il est possible de lire en creux l’objection naturelle de l’Autorité à l’imposition de barrières à l'entrée (notamment géographique) sur un marché de nature à entraver le libre jeu de la concurrence, comme elle le souligne à propos du choix d’un critère d’allotissement géographique à l’échelon départemental (§§68 et s.). On peut ainsi retenir que tout futur texte qui contiendrait des dispositions relatives à un cloisonnement territorial par une filière REP pourra être critiqué comme ne répondant pas à la grille d'analyse de l'autorité de la concurrence.
 
  •  Enfin, l'Autorité va au-delà la seule question des critères d'allotissement dont elle est saisie, en donnant son analyse sur le  système "mixte" envisagé pour la filière huiles, qui entend mélanger les modèles de l'éco-organisme opérationnel et de l'éco-organisme financier « par volonté d'échapper aux inconvénients propres » à chacun de ces modèles. En l'occurrence, l'Autorité considère que ce système mixte n'est pas de nature à atteindre les objectifs qu'il prétend se fixer et remet en question sa pertinence, d'autant plus qu'un système similaire serait envisagé pour les filières REP du bâtiment et de l'automobile (§83). Cependant, en dépit d'un effort de reformulation, le système mixte est maintenu dans la version publiée du décret, sans être totalement cohérent avec la distinction entre éco-organismes opérationnels et financiers opérée par l'article R.541-104 du code de l'environnement ou par le précédent avis n° 12-A-17 de l'Autorité.